17 février 1791 : Lettre de Marie-Louise de Beaujeu à  sa mère

Résumé de la lettre

Marie-Louise Liénard de Beaujeu écrit au Canada à  sa mère Michelle-Élisabeth Foucault. Elle fait le point sur la situation catastrophique que vivent la noblesse et le clergé en France. Elle parle aussi de politique et profite du retour de madame de Lavaltrie au Canada pour lui transmettre de nombreuses nouvelles : mort de son oncle l’abbé de Beaujeu et de mademoiselle de Morssan de Vassan; situation à  la Martinique, à  la Guadeloupe et à  St-Domingue, etc. Elle parle également de son cousin Franà§ois-Charles de Beaujeu qui demeure non loin de Paris. On apprend, entre autres, que la fille de Franà§ois-Charles est morte de la petite vérole et que la maladie a aussi frappé son épouse et son fils.

Mots clés

Relations familiales, réalités politiques

Transcription


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Lettre du 17 février 1791, Marie-Louise de Beaujeu à  sa mère, page 1

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[17 février 1791]

Jé ne sais par quel fatallite, ma chere maman, j’ai été privé
de l’avantage de recevoir cet anné de vos nouvelles. C’est d’autant
plus affligeant pour moi, qu’au qu’une des lettres venue du Canada
ne font mention de vous. Jugée de més inquietudes et de més craintes
sur votre sancté, votre long silence vraiment accablant me
jette dans un désespoir que jé ne saurois vous exprimer. Jé
frémis sur votre éxistance, et crain par dessus toutes, l’avenir
qui màªst préparée. Daigner donc de grace, si j’ai encore le bonheur
de vous conserver, me donner signe de vie. Cette empressement
de votre part me rendra ma tranquillité que jé ne saurois
goutter tant que jé seres privé du plaisir et de la douce
satisfaction de m’entretenir avec vous, chere maman, que
j’aime plus que moi màªme.

Bien assuré que cet lettre vous parviendra, la remàªttant
moi màªme a Mad[ame] de Lavaltrie, qui veut bien s’en charger,
jé me permàªttrés de vous parler lésgerement des malheurs de
notre royaume, qui dans le moment est en feux. Rien n’est
surre, les proprietées sont attaqués, le clergé écrasée, la
noblesse culbuttée est sés titres enlevées, plus d’armées, une
égallitée dégoutante de tous les états, des impots qui nous enléve
en grande partie notre revenue, enfin chere maman, la France
est si malheureuse que si jé trouvoit a vendre més biens fonds, jé
partiroit pour les Indes ou jé serois absolument libre, et ou jé
jouirois au moins de ce qui m’apartient, ne pouvant me flatter
de conserver, si les choses ne change pas, le peu de biens que j’ai.


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Lettre du 17 février 1791, Marie-Louise de Beaujeu à  sa mère, page 2

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Vous ne concevés pas, non, combien nous sommes a plaindre, nous sommes
plus que jamais menassée du’une guere civille, de religion
&&& Heureux encore, si nous conservons la vie, il aura
avant peu beaucoup de sang répandu. L’emperreur se dispose
a entrer en France au printemps. Il veut venger la reine
sa soeur, et remàªtre le roi sur le trone, mais que
deviendrons nous. Nous serons tous égorgée, sans pouvoir nous
défendre, et voyla ma chere maman, notre position. Dieu
veuille répandre sés benédictions sur nous.

Jé ne vous feres pas le détailles des pertes que nous faissons par
la révollution. Jé ne veux pas vous affliger, mais ce qui peut
vous consoller, c’est l’asurance que jé vous donne de ne pas
contracter de dettes. Jé vivrai avec le peu que j’aurai, et
ferai tous mes éffords pour assurer un petit bien àªtre a mon
pauvre enfan, dont l’educcation n’est encore québauchée.
Vous en jugeré par la lettre, qu’il vous écris et que vous
trouvéres ci joint. C’est avec raison, qu’il vous fait l’aveu de son peu
de progràªt. Il est sensible et avec le désir de bien faire. Il est trés
dissipée et for paresseu. Sa grande vivacité l’emporte et
fait qu’il perd son temps, ce qui me désespere, désirand par desus
toutes l’avoir aupràªs de moi.

Jé vous ait dits ci desus, que jé profitai de loccassion de Mad[ame] de
Lavaltrie, qui retourne en Canada. J’aplaudis de tous mon coeur
au parti qu’elle a pris, mon étonnement est qu’elle ne la pas pris &&&
plutà´t, car trés certainement elle ne peu pas se louer du séjour


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Lettre du 17 février 1791, Marie-Louise de Beaujeu à  sa mère, page 3

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qu’elle a fait en Heurop, elle y a verssée bien des larmes. C’est une
femme respectable que nous perdons. Sa fille, que j’aime bien
sincerment, est on ne peu plus douce et plus aimable. Elle mérite
bien d’etre heureuse. Jé félicite a l’avance est c’est de tous mon
coeur, celuy qui l’epousera. Si vous aves le plaisir de la voir
faite lui bien des amitiées pour moi. Elle est chargée de notre
part d’un million de choses pour vous, pour mon beau frere, et
mes neveux.

Jé vous apprand non sans une douleur extreme, la mort du pauvre
abbée de Beaujeu, et celle de M[ademoiselle] de Morssan de Vassan. M[onsieur] de
Vassan a été trés mal, mais il est trés bien aujourd’hui. Il a aupràªs de
lui, Mes[demoiselles] Berette et Archanges, qui ont pour lui les plus grandes
attantions. Il n’a rien a désirer, elles ne sont occuppés que de ce qui
peut lui étre agréable. J’ai passées dix jours avec eux, il a un
mois, et j’en ai eu des nouvelles hier. Ills jouissent de la meilleure
sancté, et me prie de les rappeller a votre souvenir et de vous
assurer de tous leure attachement.

J’ai dans ce moment, Mad[adme] Landrieve, chez moi, elle est fraiche
et grasse a faire plaisir, elle ne veux pas àªtre oublié, elle vous
dis un million de choses tendre, c’est ma bonne amie, jé l’aime
de tout mon à¢me.

Repentignie est depuis le mois &&&&& d’octobre, a la Guà¢deloupe,
cette colonie est assée tranquille dans ce moment. Il y a eu des troubles mais
non d’efussion de sang. Il n’en est pas de màªme de la Martinique oà»
il en a eu beaucoup de répandues et ou il s’en répant encore. Le pauvre
M[onsieur] de Gane, nées en Canada, a été victime du sort, il a été cruelment


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Lettre du 17 février 1791, Marie-Louise de Beaujeu à  sa mère, page 4

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assassinée par les amis de la révollution. St-Dommingue a été aussi
le theatre de la guere. Les pauvres des Ligneris, s’en sont trés
heureusement tirée. Lainée étoit en France, mais le cadet a courru
les plus grand dangées. M[esdemoiselles] des Ligneris, sont toujours a Loche
accablées par les revers et craignant de tout perdre, enfin
chere maman, nous sommes tous malheureux, il faut vaincre ou périr
voila le tableau.

Jé me plais a croire que ce n’est pas votre sancté qui est cause
que jé n’ai pas recue de vos lettres, cet année. Jé suis persuà¢dé
que vous aves ygnoré le départ des vaissaux pour l’Angleterre
et que c’est le motif seul, qui m’a privé du bonheur de vous
lire. De grace, chere maman, ne manqués pas a l’avenir de m’ecrire
c’est la seul consollation que j’ai eu et qui jé puisse avoir.
Lisés dans mon coeur, il vous est entierment dévoué. Jé vous aime,
chere maman, plus que jé ne saurois vous le dire, que ne
pui-jé vous convaincre de ce sentiment aussi des sincer et
réspectueux attachement avec le quel j’ai l’honneur d’etre
votre trés humbles et trés obéissante servante fille.

De Beaujeu Foucault

M[onsieur] de Beaujeu, mon cousin, est retiré dans une terre
qu’il a loué a dix lieux de Paris. Il vient de perdre sa fille,
son fils et sa femme, ont eut la petite vérolle qui
les a bien maltraà®tés. Le fils, étoit beau, la mere étoit
trés jolie, l’une et l’autre sont devenues monstre, ce qui
leurs laisse bien de la douleur. C’est bien fait pour les
affliger. Jé vous ambrasse mille fois aussi tendrement que jé
vous aime, trés chere maman.


P03/A.109, Fonds De Beaujeu, Centre d'histoire La Presqu'à®le

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